Unir élevage et maraîchage

Fabien Mathieu (à droite) et son père, Laurent, avec les limousines élevées à La Roumagère. (Ph. A. Merlingeas)

INSTALLATION. Fabien Mathieu a repris l’exploitation familiale, à Montignac-Lascaux, avec un associé. En bio, ils élèvent des limousines et cultivent des légumes vendus localement.

Même si Fabien Mathieu ne se destinait pas à reprendre l’exploitation à l’origine, son attachement profond à la ferme familiale a sans doute déterminé l’avenir du jeune homme de 24 ans. Après avoir obtenu un bac scientifique à Terrasson-Lavilledieu, il part en faculté de sciences à Bordeaux. « Ni la ville, ni l’enseignement ne m’ont plu. J’ai arrêté au bout de six mois et j’ai fait un semestre de réorientation », raconte-t-il. 

Située sur des hauteurs, au lieu-dit La Roumagère à Montignac-Lascaux, la ferme existait toujours avec une activité réduite. « Il restait quelques vaches. Nous y avons grandi avec mes deux sœurs. Nous y étions très attachés », raconte Fabien. Son père, Laurent Mathieu, maire de Montignac, avait cessé la production laitière et la culture du tabac depuis plus de 10 ans. Double actif, il a aussi été directeur du GER du Sarladais. « Je me suis très vite dit que je ne voulais pas partir d’ici », insiste le fils. 

Il va suivre un BTSA production horticole à Objat (Corrèze) qu’il valide en 2019. « Le maraîchage est vraiment ce qui me branchait. » C’est là qu’il va rencontrer son futur associé, Jules
Saunière, qui suit le même cursus. Il cherchait à s’installer hors cadre familial. « À la fin du BTS, beaucoup d’élèves avaient déjà leurs projets définis, sauf Jules et moi. »

Le choix de la diversification

Outre sa volonté de cultiver des légumes, Fabien Mathieu souhaitait également élever des animaux. « L’exploitation est typique du Périgord. Nous avons 70 ha avec 55 ha de prairies où l’on ne peut pas faire grand-chose d’autre. L’élevage est davantage là pour occuper de la surface. Nous voulions aussi nous diversifier », reconnaît-il. Les limousines sont vendues en broutards à un négociant et, depuis cette année, à la coopérative Unebio.

Au départ de leur projet, ils ont envisagé de cultiver du houblon. « Cela demandait beaucoup d’investissements. » Finalement, ils s’orientent vers le maraîchage sur 5 ha avec une petite serre de 350 m2 pour les cultures d’été comme les tomates, les poivrons et les aubergines. Tout le reste, une vingtaine de légumes, est cultivé en plein champ. Ils produisent principalement des pommes de terre et des poireaux. La production maraîchère est vendue à la ferme et sur le marché de Montignac, le mercredi et samedi matin. « La clientèle ne manque pas. Il faut que la production suive », note-t-il. Ils commercialisent aussi au magasin de producteurs Les paysans de Lascaux, à l’Intermarché de Montignac et à des restaurants. Le collège de la commune se fournit également auprès d’eux. L’établissement suit une démarche d’alimentation 100 % bio. « Nous voulions réduire le nombre d’intermédiaires au maximum », souligne le jeune installé. « Faire la même chose en viande était plus compliqué. Cela nécessite un laboratoire, du savoir-faire et du temps. Nous ne nous sentions pas de nous lancer là-dedans tout de suite. »

Défi technique du bio

Pour leur installation, ils ont racheté chacun 30 000 e de parts sociales de la société au père de Fabien. Sa mère est restée dans la structure. Ils ont investi presque 100 000 euros de matériel. Ils ont acheté des semoirs de précision, des outils de désherbage (une bineuse à guidage caméra et une herse étrille avec un brûleur thermique), une faucheuse et une faneuse, entre autres. Tous les deux ont touché la DJA (dotation jeune agriculteur).

Quant au choix de produire en bio, il est venu assez naturellement pour les deux associés. Depuis le 8 mars 2022, l’exploitation est certifiée. « C’est un défi technique intéressant », selon Fabien Mathieu. 

Le challenge n’est pas sans difficulté, notamment concernant la gestion du désherbage et de la fertilisation. « Tout notre fumier est réservé aux 5 ha de maraîchage. On met entre 20 et 30 tonnes de fumier à l’hectare par an. Nous faisons une rotation des parcelles. » Comme cet apport n’est pas suffisant, ils complètent par de l’engrais organique localisé et de la potasse. 

Quant au désherbage, les fenêtres de tir sont très courtes. Il ne faut pas les rater sous peine d’être vite dépassé par l’enherbement. « En début de saison, il faut gérer le fourrage en même temps. Cette année, cela a été particulièrement difficile », reconnaît-il. Pour irriguer, ils pompent dans la Vézère. Leur parcelle est située à proximité, à Aubas. « Nous ne souffrons pas trop des restrictions en été, quand il y en a. » 

Laurent Mathieu garde un œil sur le parcours de son fils. « Cela fait plaisir. La population s’inquiète du manque de médecins et très peu du manque de paysans », souligne-t-il. Parfois, il donne un coup de main et ne manque pas de dire ce qu’il pense au risque de déplaire… Regrettant le manque d’accompagnement technique, il ajoute : « le bio, c’est très compliqué ». 

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