Reliure de luxe faite main

Les ouvriers de l’atelier artisanal d’Invelac s’occupent de chaque ouvrage à l’unité, cousant ou collant les cahiers avant de les relier et les couvrir à la main. (Ph. L. Lemaire)

ARTISANAT. À Invelac, à Neuvic, deux savoir-faire sont réunis en un même site : l’impression et la reliure. Cette seconde activité implique un petit groupe d’artisans qui restaurent ou relient livres et revues.

L’endroit est connu et porte encore les traces de son ancienne occupation. À Planèze, sur le fronton des bâtiments pour la plupart inoccupés, est encore accroché le nom de l’usine de chaussures, Marbot, délavé, masquant la réelle activité qui anime aujourd’hui le site. Depuis 2010, Jérôme Gabuteau a en effet réuni deux entreprises qu’il a reprises : l’imprimerie Fanlac, fondée en 1968, et la reliure Devel, installée depuis 1972. Sous la dénomination d’Invelac, il a ainsi conservé le travail d’imprimeur et de relieur, une partie industrielle et une autre artisanale qui regroupent au total une quarantaine de salariés.

Chaque activité a ses locaux. Dans l’atelier de reliure artisanale, six personnes œuvrent minutieusement à relier ou restaurer des livres ou revues appartenant aux plus grandes bibliothèques françaises. Répondant à des appels d’offres, l’entreprise Invelac travaille donc pour des institutions prestigieuses ou renommées telles que le Conseil constitutionnel, la Cour des comptes, l’ENS (École nationale supérieure) ou la Sorbonne. « Nous travaillons chaque livre à l’unité. Il passe par différentes étapes pour être relié selon les demandes des clients : collée, grecquée ou cousue », détaille Pascale Bres, responsable de l’atelier de reliure artisanale.

Cinq ou six en France

Pour une reliure traditionnelle, effectuée dans la plus pure tradition, l’ouvrage passera par pas moins de 96 étapes, dont chacune prendra environ une minute. Un travail de fourmi qui représente 80 % du prix d’une reliure bien faite, que seuls quelques artisans en France sont capables de réaliser. « Il y a de nombreux artisans qui pratiquent la reliure d’art, concède Pascale Bres. Mais sur le marché plus important des appels d’offres, nous ne sommes que cinq ou six. »

Et pour cause : jusqu’à il y a peu, il n’existait aucune école de reliure. D’ailleurs, tous les salariés de l’atelier d’Invelac ont appris sur le tas.

Défaire pour restaurer

Comme Nathalie, par exemple, qui a connu à peu près toutes les étapes de fabrication de l’atelier de reliure d’Invelac depuis qu’elle y est entrée, avant de finalement devenir doreuse, l’une des phases ultimes de restauration ou fabrication.

Elle sait ainsi qu’avant d’arriver entre ses mains, les revues ou livres passent par nombre de manipulations. Prenons, ce jour-là, des magazines de la cinémathèque François Truffaut. Ils sont tout d’abord tous enregistrés, répertoriés et les références futures encodées informatiquement pour qu’en fin de chaîne, les données inscrites sur la couverture ou tranche du livre fraîchement relié soient exactes.

Les revues sont ensuite débrochées. Il faut passer par une phase de déconstruction pour en arriver à un ouvrage “neuf”. « Il faut enlever les agrafes, la couverture, la colle ou les coutures pour les livres cousus », explique la responsable de l’atelier. Certains livres anciens arrivent même très abîmés, « un bout de couverture ou de page peut manquer », pour lesquels il faut trouver une solution. « C’est un travail très minutieux, très formaté. Il faut conserver le livre dans son intégralité, que les réparations puissent être enlevées sans affecter l’ouvrage. »

Il est ensuite cousu ou collé puis relié et doté d’une couverture neuve avant de repartir habiller de prestigieuses bibliothèques, loin des anciens locaux désaffectés de l’usine Marbot de Planèze.

EN CHIFFRES

96 étapes d’une minute chacune en moyenne pour une reliure traditionnelle

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